Bien que les démarches en adoption visent plus souvent qu’autrement les personnes mineures, l’article 545 du Code civil du Québec[1] prévoit également la possibilité d’adopter un individu majeur.
Certaines conditions doivent toutefois être respectées.
Adoption de fait durant la minorité
Le premier alinéa de l’article 545 du Code civil du Québec[2] prévoit d’abord que le majeur ne peut être adopté que par les personnes qui ont exercé le rôle de parent auprès de lui durant sa minorité. Seuls les individus qui ont procédé à « la prise en charge économique, physique, morale et psychologique de l’éducation [du majeur durant sa minorité et qui ont exercé factuellement] toutes les obligations reliées au rôle parental »[3] pourront donc l’adopter. C’est ce que l’on qualifie d’ « adoption de fait » durant la minorité.
Au surplus, l’adoption ne pourra avoir lieu que si les parents biologiques n’ont pas « assumé leurs responsabilités parentales durant la minorité de l’enfant »[4]. Il doit donc y avoir désintéressement ou abandon par les parents biologiques durant la minorité afin que la procédure en adoption puisse suivre son cours[5].
Intérêt du majeur
Avant de prononcer l’adoption du majeur, les tribunaux doivent également vérifier s’il en va dans son intérêt[6].
L’intérêt du majeur sera évalué selon une approche subjective, donnant ainsi un pouvoir discrétionnaire au juge du fond[7]. Néanmoins, la Cour d’appel du Québec rappelle dans l’arrêt Droit de la famille — 2015 que « le facteur prépondérant, dans l’évaluation de la motivation et de l’effet recherché, résidera dans la qualité et la durée des rapports entre les adoptants et la personne majeure qui constitueront des indices précieux susceptibles d’éclairer le tribunal en regard de l’intérêt de l’adopté »[8]. C’est donc que si le majeur entretient une relation profonde et durable avec ceux qui souhaitent l’adopter, il s’agira d’un bon indicateur à l’effet qu’il en va dans son intérêt de procéder.
Absence d’adoption de fait durant la minorité
Malgré ce qui précède, est-il possible d’adopter un majeur sans s’en être occupé durant sa minorité? L’alinéa 2 de l’article 545 du Code civil du Québec[9] répond à cette question par l’affirmative, mais seulement si, encore une fois, il en va dans l’intérêt de ce dernier.
À titre informatif, il en serait ainsi pour une personne arrivée au Canada durant sa majorité et qui a été pris en charge par un homme l’ayant protégé de certains individus aux personnalités néfastes[10].
Une question subsiste toutefois : est-il possible pour une personne majeure adoptée durant sa minorité de se faire ré-adopter par ses parents biologiques en faisant une demande basée sur l’article 545 du Code civil du Québec[11]? L’auteur Alain Roy est d’avis qu’il s’agit d’une possibilité, à condition que « l’enfant [n’ait] pu développer de véritables relations parentales avec son parent adoptif durant sa minorité et par la suite »[12]. Dans un tel cas de figure, les tribunaux pourraient ainsi passer outre la condition de l’ « adoption de fait ».
Gabriel Roussin-Léveillée, étudiant en droit
Juriseo Avocats
227, boul. des Braves, suite 201
Terrebonne (Québec) J6W 3H6
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[1] Code civil du Québec, RLRQ, c. CCQ-1990 (ci-après « C.c.Q. »), art. 545.
[2] Id.
[3] Alain ROY, Droit de l’adoption : adoption interne et internationale, 2e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2010, par. 20.
[4] Id.
[5] Id.
[6] Id., par. 21.
[7] Droit de la famille — 2015, [1994] R.J.Q. 1520, 1522 (C.A.).
[8] Id.
[9] Préc., note 1.
[10] Droit de la famille — 2256, [1995] R.D.F. 819, 820 (C.Q.).
[11] Préc., note 1.
[12] A. ROY, préc., note 3, par. 22.