La séparation des conjoints de fait est une réalité complexe et souvent méconnue en droit québécois. Contrairement au mariage et à l’union civile, l’union de fait ne confère pas les mêmes droits et obligations juridiques, ce qui peut entraîner des complications lors d’une rupture. Cet article vise à expliquer les aspects juridiques principaux relatifs à la séparation des conjoints de fait au Québec, en s’appuyant sur les lois applicables et sur les nouveautés en matière d’union parentale.
Qu’est-ce qu’un conjoint de fait au Québec ?
Le Code civil du Québec ne reconnaît pas de statut juridique spécifique aux conjoints de fait. Ce terme est utilisé pour désigner des personnes qui vivent ensemble sans être mariées ni unies civilement. Contrairement à certaines provinces canadiennes où les unions de fait sont régies par la loi, au Québec, aucune disposition légale n’encadre directement cette union.
Quels sont les droits et obligations des conjoints de fait sans enfant lors d’une séparation ?
- Biens et patrimoine familial
Les règles relatives au patrimoine familial ne s’appliquent pas aux conjoints de fait. Cela signifie que chacun conserve la propriété des biens qu’il possède et dont ils sont propriétaires, même s’ils sont utilisés en commun. Toutefois, si des biens ont été acquis conjointement, ils devront être répartis selon les règles de copropriété, à défaut d’un contrat de vie commune.
- Prestation compensatoire
Théoriquement, les conjoints en union de fait ne peuvent tirer profit d’une prestation compensatoire. Les conjoints de fait peuvent, dans certains cas, demander une compensation, en vertu de l’article 1493 du Code civil, soit selon l’enrichissement injustifié, s’ils prouvent avoir contribué significativement au patrimoine de l’autre, s’il y a enrichissement d’une part et appauvrissement de l’autre. Cette demande est toutefois soumise à l’approbation des tribunaux et demeure hautement discrétionnaire.
- Obligation alimentaire
Contrairement aux conjoints mariés ou unis civilement devant se conformer à l’article 585 du Code civil, les conjoints de fait n’ont pas droit à une pension alimentaire après la séparation, à moins d’indication contraire dans un contrat de vie commune signé par les deux conjoints.
Comment prévenir les complications liées à la séparation ?
Pour prévenir les litiges et les désagréments pouvant naître d’une séparation entre conjoints de fait, il est pertinent d’établir un contrat de vie commune ou une convention écrite. Ce type d’entente peut prévoir le partage des responsabilités durant la vie commune, le partage des biens en cas de séparation, le versement d’une prestation alimentaire à l’un des conjoints en cas de séparation, et plusieurs autres possibilités d’ententes qui sont à la discrétion des conjoints. Il est essentiel de consulter un avocat ou un notaire pour l’élaboration de ce type de contrat, dans le but d’en assurer leur cohérence et de les officialiser.
Projet de loi 56 : le régime d’union parentale
Depuis les récentes réformes législatives en matière familiale, la notion d’union parentale a été introduite afin de mieux protéger les enfants issus de l’union de fait. Les dispositions de ce nouveau régime entrent en vigueur le 30 juin 2025, et s’appliquent pour tous les conjoints de fait devenus parents d’un enfant en commun né à partir du 29 juin 2025. Cette approche a pour but d’assujettir les conjoints ayant un ou plusieurs enfants en commun à des effets juridiques particuliers, les liant par des responsabilités communes.
Les conjoints ayant un enfant en commun peuvent modifier les éléments constitutifs du patrimoine d’union parentale, ou même s’en soustraire complètement. Tout changement relatif au patrimoine d’union parentale doit être officialisé par acte notarié en minute. À défaut d’un acte notarié pour valider un changement ou un retrait, la modification peut être déclarée nulle de nullité absolue.
- Effets
Plutôt que de parler d’un patrimoine familial, il sera plus approprié d’utiliser le terme du patrimoine d’union parentale, dans le cadre du partage des biens. Il est inclus ici ; la ou les résidences familiales, les biens meubles meublant ces résidences, ainsi que les véhicules automobiles utilisés pour les déplacements familiaux. Dans cette même perspective, l’union parentale confère à la résidence familiale une protection équivalente à celle prévue dans le cadre du mariage ou de l’union civile (voir article 521.24 C.c.Q, non en vigueur), avec quelques adaptations.
De plus, les conjoints liés d’une union parentale peuvent bénéficier de la vocation successorale du conjoint survivant, en l’absence d’un testament, à condition d’avoir fait vie commune pendant une année ou plus avant le décès. À cet effet, le conjoint survivant peut recueillir un tiers de l’héritage du conjoint décédé, et les deux tiers seront attribués aux enfants.
Finalement, les conjoints formant une union parentale peuvent bénéficier d’une prestation compensatoire en vertu de l’article 521.43 (non en vigueur), s’ils croient avoir enrichi le patrimoine de l’autre conjoint et s’en être appauvri. Le conjoint qui prend des mesures pour demander une prestation compensatoire doit faire la preuve de sa contribution au patrimoine de l’autre conjoint.
L’obligation alimentaire entre conjoints d’union parentale ne s’applique toujours pas ici, à moins d’une stipulation particulière relevant d’une convention écrite ou d’un contrat de vie commune entre les conjoints. Cependant, l’obligation alimentaire envers les enfants issus de l’union est identique, conformément à la Loi sur le divorce et aux dispositions du Code civil du Québec.
Conclusion
La séparation des conjoints de fait au Québec n’est pas encore encadrée par un régime juridique spécifique, ce qui laisse une grande place aux accords privés. Cependant, les récentes avancées en matière d’union parentale, à partir de juin 2025, démontrent une volonté accrue de protéger les droits des enfants et ceux du conjoint le plus vulnérable. Pour minimiser les litiges, il est essentiel de bien s’informer, de documenter ses intentions et de consulter un professionnel du droit. Ces précautions permettent de protéger les intérêts de chaque partie et d’assurer une transition harmonieuse en cas de rupture.
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